Joseph Koto (Sénégal) : "La Cosafa Cup, une nouvelle expérience pour nous"

Publié le par Frank Simon

Koto fut le premier sélectionneur des Lions de la Teranga à aligner Sadio Mané en 2013.

Koto fut le premier sélectionneur des Lions de la Teranga à aligner Sadio Mané en 2013.

Sélectionneur de l'équipe nationale sénégalaise invitée à participer actuellement à la Cosafa Cup en Afrique du Sud, l'expérimenté technicien a accepté de parler de cette tournée. Mais aussi de nous livrer ses impressions sur le foot sénégalais et Sadio Mané, dont il fut le premier coach chez les Lions de la Teranga...

 

« Coach, quel est l’objectif recherché à travers cette participation à la Cosafa Cup ?

L’objectif recherché par la Fédération, c’était d’aligner l’équipe nationale locale, composée de jeunes éléments. On a débuté un travail auprès des locaux et des U23 depuis notre nomination. On aurait aimé disposer des expatriés mais on n’a pas eu tellement de temps pour monter l’équipe. Les locaux sur lesquels on comptait, on ne pouvait pas les avoir car la majorité joue dans des clubs de la tête du championnat qui se dispute toujours. Voilà pourquoi les clubs ont refusé de libérer leurs joueurs. Nous on a fait avec des joueurs de D2 et de DH, mais aussi de D1. Ca nous sert de préparation.

Quel est l’intérêt de jouer cette compétition loin de votre sous-région, en plein hiver austral ?

Nous, on ne savait pas trop à quoi s’attendre. C’est une nouvelle expérience pour nous. Ces jeunes joueurs qui veulent aller en Europe ont l’occasion de jouer en hiver.

De quels moyens avez-vous disposé pour vous préparer (stage, matches amicaux) ?

Pour la préparation, ce fut très court. A peine deux semaines. On a essayé de regrouper les joueurs ensemble. Ils étaient 35 au départ. Ensuite, il a fallu choisir, qui plus est en fin de saison. Il fallait amener 20 joueurs. On a choisi les vingt les plus en forme.

Vous avez débuté par une courte défaite face à la Namibie qui alignait son équipe du CHAN. Au lendemain de ce match, à froid, quelle est votre analyse ?

SI vous regardez le match perdu 2-1, on l’a pratiquement dominé. On a été surpris sur deux ballons. C’est dû principalement à la fatigue pour arriver en Afrique du Sud. On a voyagé avec des escales, jusqu’à six heures de temps. C’était difficile pour nous. On n’a pas pu bien récupérer. Le match était prévu 24 heures plus tard mais le retrait de deux équipes a obligé l’organisation à avancer la rencontre. Ne nous lamentons pas là-dessus. Il faut réagir, se ressaisir. Maintenant, on se prépare en conséquence pour affronter le Mozambique ce vendredi.

Jouer en Afsud ce tournoi peut-il bénéficier à certains joueurs, qui taperaient dans l’œil des clubs locaux ?

Les joueurs sont des pros. Quel que soit l’endroit, il y a la possibilité d’être remarqué. Mais ce n’est pas le but. Le but, c’est d’être dans la continuité de notre travail. Si jamais un joueur se révèle et qu’il est recruté, tant mieux. Ici, en Afrique du sud, avec la pandémie, il n’y a personne dans les tribunes. C’est très corsé au niveau de la bulle sanitaire, on prend des barquettes et on mange dans les chambres, comme à l’université ! C’est une nouvelle expérience. Et ça va faire grandir les jeunes.

Par le passé, un tournoi sous-régional était un rendez-vous annuel prisé, le Cabral. Regrettez-vous la fin de ce tournoi qui a permis de révéler de nombreux joueurs ? Quel souvenir en conservez-vous ?

C’est vrai par le passé, ce tournoi a révélé beaucoup de joueurs. A titre personnel, j’en ai disputé 7 sur les 9 gagnés par le Sénégal. ! C’est une compétition qui nous a permis d’affronter de grands joueurs comme le Gambien Biri Biri. Ca a été une bonne expérience notamment pour la génération des Lions de 1986.

Vous travaillez avec un groupe de joueurs locaux. Comment expliquez-vous : justifiez-vous le fait que le sélectionneur national accorde si peu d’intérêt aux éléments issus du championnat sénégalais ? Aucun joueur du terroir ne peut-il donc prétendre à grandir dans la sélection A ?

C’est une politique que l’on doit mener. Je le répète tout le temps. On a des bons joueurs locaux. Mais dès qu’ils sont en Europe, ils font à peine un an et c'est là qu'on les appelle ! Changeons d’attitude. Concentrons-nous davantage sur les locaux, mettons-les dans les conditions de performances, regroupons-les. Trouvons des tournois pour eux afin qu’ils progressent et grandissent. S’il y a un bon suivi, c’est possible, comme au milieu des années 1980. Il faut une politique pour ça. Je refuse de mettre une équipe du Sénégal sans trois ou quatre locaux ! Intégrer les A, ça leur permet d’apprendre et ça les motive. 

Vous avez été le premier à faire confiance à un certain Sadio Mané. Racontez-nous.

En 2013, j’ai pris l’équipe nationale et j’ai fait appel à la génération des Sadio Mané et Idrissa Gana Gueye, Moussa Konaté. Je fus le premier à les aligner en équipe première. On a joué et gagné 1-0, une première, au Maroc, sur un but créé par Sadio et concrétisé par Konaté. Je crois au travail, il n’y a que ça qui paie. Voilà aussi pourquoi ils sont à ce niveau. Je suis fier de dire que Sadio fut l’un de mes joueurs. Toujours en train de bosser, avec l’ambition de réussir.

Quel regard portez-vous sur le travail de clubs comme Teungueth FC ou le Jaraaf qui ont réussi un formidable parcours en coupes interclubs cette saison. Doit-on s’attendre à en voir d’autres émerger sur la scène africaine ?

Le parcours de Teungueth et du Jaraaf en Coupes d’Afrique interclubs, c’est extraordinaire ! Ca prouve que notre football au niveau de la Ligue pro, n’est pas mal. Mais il fait s’améliorer dans la régularité, dans la prise en charge des équipes, dans la motivation des joueurs. Nos équipes ont joué des grands clubs avec d’énormes moyens mais ils ont réussi à les bousculer. Le football actuel, ce sont les moyens. Sans ça, c’est compliqué. On a des clubs-académies, Diambars, Génération Foot, Dakar Sacré Cœur, avec des dirigeants qui mettent des moyens et sont en partenariat avec des clubs européens. C’est une bonne chose. Qu’on en profite pour mieux s’organiser !

Votre dernier mot ?

J’ai une suggestion par rapport à notre football. Aujourd’hui, les navétanes jouent un grand rôle chez nous mais il faut les réorganiser. Ce serait plus rentable si on les limitait aux cadets et aux juniors. En clair, tous ceux qui passent seniors doivent aller dans des clubs. Il y a eu des dérives par le passé. Mais c’est une compétition qui peut beaucoup nous apporter dans les petites catégories ».

Propos recueillis par Frank Simon

Copyright @AfroFootball55

 

Publié dans INTERVIEW

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article